Les paramètres du sommeil vus sous l’angle objectif et subjectif au cours des TSA : une méta-analyse éclairante  

Les troubles du spectre autistique (TSA) regroupent de nombreuses situations cliniques complexes et hétérogènes qui relèvent d’un trouble du neurodéveloppement. Leur sévérité variable est aggravée par diverses comorbidités qui hypothèquent la qualité de vie du patient et de sa famille. Les troubles du sommeil qui font partie de celles-ci sont particulièrement fréquents, leur prévalence chez les enfants et les adolescents étant comprise entre 11 et 37 %. Les chiffres seraient même compris entre 40 % et 93 %, selon les sources, au sein de la population juvénile considérée dans son ensemble.

Ces fluctuations tiennent aux critères objectifs ou subjectifs retenus pour définir les troubles du sommeil, tout autant qu’à l’hétérogénéité des études relevant de facteurs multiples intriqués, qu’ils soient biologiques, sociaux, psychologiques ou encore environnementaux.

L’architecture du sommeil : paramètres macrostructuraux et microstructuraux

L’architecture du sommeil doit être paramétrée pour évaluer au mieux ces troubles en termes de sévérité ou de prévalence. Divers paramètres dérivés de l’enregistrement polysomnographique ou de l’EEG de sommeil  peuvent être utilisés pour réduire les biais d’interprétation et comparer les études entre elles, certaines faisant en outre appel à l’actigraphie, ce qui ne simplifie pas la donne.  Les paramètres objectifs sont macrostructuraux ou microstructuraux. Les premiers sont les suivants : temps passé au lit, durée total du sommeil, heure de l’endormissement, latence et efficacité du sommeil, réveils nocturnes, pourcentage de chaque stade (REM ou rapid eye movement sleep, NREM ou stade 1, stade 2 et stade avec ondes lentes). Les paramètres microstructuraux, pour leur part, sont évalués au moyen de scores ou de techniques du traitement du signal du type CAP (cyclic alternating pattern), analyse spectrale, puissance spectrale du signal EEG, complexes k ou rythme Mu.

Une méta-analyse éclairante

Une méta-analyse permet de faire le point sur les paramètres subjectifs et objectifs couramment utilisés pour évaluer les troubles du sommeil chez les enfants et les adolescents atteints d’un TSA. Les bases de données suivantes ont été mises à contribution : PubMed, Scopus et Web of Science. La sélection et l’analyse des études ont reposé sur les recommandations PRISMA (Preferred Reporting items for Systematic Review and Meta-analyses).

Au total, les vingt enquêtes ou études du type cas-témoins retenues confirment la prévalence élevée des troubles du sommeil dans ce contexte, si l’on se réfère aux sujets à développement typique. Les paramètres macrostructuraux précédemment définis, quand ils ont concordé avec l’évaluation subjective du sommeil par les parents, révèlent un pourcentage plus élevé de signes nocturnes d’insomnie. Par ailleurs, les anomalies microstructurelles orientent vers une relation bidirectionnelle entre le dysfonctionnement cérébral et les troubles du sommeil au point de faire évoquer des processus pathogéniques intrinsèques à l’activité neuronale elle-même.

La qualité du sommeil doit être évaluée de manière objective ou subjective chez les enfants ou adolescents atteints d’un TSA. La haute prévalence des troubles du sommeil dans ce contexte et leur impact potentiel tant sur l’expression clinique que sur l’évolution du TSA justifie cette recherche qui a une finalité thérapeutique. Il importe désormais de mieux saisir leur pathogénie et leur rôle en tant que marqueur spécifique du développement cérébral atypique qui caractérise cette affection fréquente. De même, il convient de les relier à l’âge, au niveau cognitif ou encore à la sévérité, voire au pronostic du TSA.

Dr Philippe Tellier


Article originel :
Maria Giuseppina Petruzzelli et coll. Subjective and Electroencephalographic Sleep Parameters in Children and Adolescents with Autism Spectrum Disorder: A Systematic Review. J Clin Med. 2021 Aug 30;10(17):3893.
https://doi.org/10.3390/jcm10173893