L’architecture du sommeil dans les troubles du spectre de l’autisme  

Les troubles du spectre de l’autisme (TSA) sont associés à diverses comorbidités parmi lesquelles figurent en bonne place les troubles du sommeil qui peuvent être évalués de manière subjective ou objective. Les questionnaires et agendas du sommeil participent à l’approche subjective, qui a ses limites ; les méthodes objectives offrent certainement plus d’exactitude diagnostique, tout en permettant de quantifier divers paramètres corrélés à l’architecture du sommeil. L’actigraphie, l’enregistrement polysomnographique (EPS) et la vidéosomnographie sont utilisés à cette fin. C’est cependant l’EPS qui est le gold standard dans ce domaine en dépit de son coût élevé. Il permet un enregistrement continu des stades du sommeil et des paramètres structurels qui leur sont rattachés. L’efficacité et la durée de sommeil, les éveils nocturnes mais aussi la latence d’endormissement sont autant d’informations accessibles à l’EPS.

Selon cette approche, la fréquence des troubles du sommeil serait de 25 % chez les individus à développement typique et atteindrait plus de 80 % en cas de TSA.  Les répercussions importantes des troubles du sommeil sur les fonctions cognitives et émotionnelles tout autant que sur les comportements sont considérables, de sorte que leur connaissance mérite d’être largement approfondie.

C’est ainsi qu’une méta-analyse a été réalisée pour révéler les différences d’architecture du sommeil entre les profils à neuro développement typique et ceux avec TSA.

Onze études : 209 cas de TSA, 153 témoins

Les auteurs de la méta-analyse ont recherché les articles scientifiques publiés sur le sujet jusqu’au 14 juillet 2019, dans les bases de données suivantes: PubMed, Web of Science, Cochrane Library et China National Knowledge Infrastructure (CNKI), et ont retenu 11 publications incluant toutes des cas témoins. Pour rechercher les différences d’architecture de sommeil entre les 2 populations, onze paramètres obtenus à partir de l’EPS ont été évalués selon leur taille d’effet (d de cohen) et leur intervalle de confiance (IC) à 95 % avec un modèle à effets aléatoires, et l’hétérogénéité entre les études a été évaluée au moyen des tests Q de Cochran et I2.

La comparaison entre les 209 cas (patients avec TSA) et les 153 témoins (individus à développement typique) a révélé et quantifié des différences significatives sur trois paramètres représentatifs de l’architecture du sommeil :

  • durée totale de sommeil : taille d’effet d = -0,52 (IC 95 % : -0,97, -0,08) ;
  • efficacité de sommeil : taille d’effet d = -0,69 (IC 95 %: -1,27, -0,11) ;
  • durée du sommeil de stade 1 : taille d’effet d = 0,93 (IC 95 %: 0,37, 1,48)

Cette méta-analyse qui porte sur onze études cas-témoins confirme l’existence d’altérations dans l’architecture du sommeil chez les patients avec TSA. Sur les onze paramètres dérivés de l’enregistrement polysomnographique comparés entre cas et témoins, trois sortent du lot en termes de signification statistique et clinique : la diminution de la durée et de l’efficacité du sommeil est particulièrement nette dans la population TSA, tout autant que l’augmentation de la durée de la phase 1 du sommeil. Le petit nombre de cas de TSA, les critères diagnostiques variables d’une étude à l’autre, l’hétérogénéité des troubles autistiques sont autant de limites qui incitent à utiliser l’EPS sur une plus grande échelle pour mieux connaître et quantifier les troubles du sommeil dans ce contexte neurologique particulier.

Dr Philippe Tellier


Article originel :
Chen X et coll. Characteristics of sleep architecture in autism spectrum disorders: A meta-analysis based on polysomnographic research. Psychiatry Res. 2021 ; 296:113677. 
https://doi.org/10.1016/j.psychres.2020.113677